23 juil. 2012

Chapitre 1 : La rencontre

La sonnerie de mon téléphone me réveilla. Dans un grognement je désactivai l’alarme qui me servait de réveil. Roulant en boule sous la couverture, je ne luttai pas longtemps contre le sommeil qui s’emparait de moi à nouveau. Je rêvais de la soirée de la veille. Je l’avais passée en compagnie de mes « amis », mais comme d’habitude, je ne m’étais pas amusée. Trop de monde, trop de bruit… Je m’étais isolée à une table pendant qu’ils se déhanchaient tous sur la piste de danse, au rythme de ce qu’ils appelaient musique. Un jeune homme m’avait abordé. Sourire en coin, cheveux noirs en bataille, yeux bruns dorés… Me cachant derrière mon éternelle timidité, j’étais restée de marbre face à son charme évident. Pourtant il ne s’était pas lassé de mon immobilité. Voyant que je ne réagissais pas, il avait changé de tactique en tournant sa chaise face à la piste. Il avait croisé les bras sur sa poitrine et s’était muré derrière le silence, penaud. Je ne pouvais évidemment pas m’empêcher de le regarder puisqu’il s’était placé devant moi, me barrant la vue à toute autre chose. Mon pied battait la mesure et mon visage trahissait mon agacement. Au bout d’une demi-heure, constatant qu’il ne cesserait pas son manège, je m’étais dirigée vers la sortie de la boite de nuit. La panique m’avait envahi en prenant conscience que je n’étais pas venue avec ma voiture, me rappelant que nous avions décidé de faire du covoiturage. Je jurai lorsque je m’étais aperçue de sa présence. Il était là, face à moi, un sourire victorieux illuminant son visage. Il avait proposé de me raccompagner. J’avais hésité, le jaugeant d’un œil méfiant. Il ne paraissait pas dangereux et j’étais fatiguée. J’avais finalement accepté son invitation, portée par une confiance sortit de je ne sais où, et m’étais installée côté passager dans son Audi (rien que ça !). Tant pis pour les autres, j’étais certaine qu’ils ne remarqueraient pas mon absence.

- Tu viens souvent ici ?

Sa voix m'avait semblé différente de celle que j’avais entendue dans cette salle surpeuplée. Il avait dû constater mon étonnement car son visage était devenu sérieux.

- Un problème ?

J’avais été incapable de sortir un mot. Pourquoi sa voix me rendait-elle si nerveuse ? Je lui avais lancé un bref regard. Il semblait concentré sur la route. D’une voix un peu trop aigüe à mon goût, je lui avais signalé de tourner à droite à la prochaine intersection. Mon cœur battait à la chamade. Pas de vouvoiement. C’était comme si nous nous connaissions déjà…

Mon alarme se mit à sonner de nouveau et je me redressai brutalement dans mon lit, paniquée. Regardant l’heure sur mon téléphone, je me jetai hors des draps et filai prendre une douche. J’avais rendez-vous avec lui dans une heure. Quelle idée avais-je eu d’accepter de le revoir ? J’avalai en vitesse mon bol de céréales et retournai dans ma chambre. Mon téléphone sonnait. Numéro inconnu.

- Allô ?

- Salut, c’est Ethan, je serais chez toi d’ici cinq minutes. Tu es prête ?

- Non pas tout à fait, attends encore un peu s’il te plait. Avais-je dis précipitamment en me figeant.

Je l’entendis rire. Quelle idiote. Il était en voiture, que pouvait-il faire d’autre…

- J’attendrai dans la voiture alors.

Il n’attendit pas ma réponse et raccrocha. Comment avait-il eu mon numéro ? Je ne me rappelais pas le lui avoir donné. Je notais mentalement de lui poser la question.

Ne perdant pas une seconde de plus, je finis de me coiffer et enfilai mes chaussures. Je m’apprêtai à sortir lorsque je revins sur mes pas, écrivant un mot à mes parents en leur expliquant que je passerais mon dimanche avec un ami. Ils s’étaient absentés depuis une semaine, fêtant leur anniversaire de mariage à Venise, et devaient rentrer dans la journée. Je me lançai un dernier coup d’œil dans le miroir de l’entrée, replaçant derrière mon oreille une mèche de cheveux rebelle. Une fois la porte verrouillée, je me tournai enfin vers la voiture noire de cet inconnu qui ne me laissait pas indifférente. Il sortit de la voiture, m’accueillit avec un sourire à croquer, et m’ouvrit la portière. Je m’installai, mal à l’aise, et découvrit Ethan à la lumière du jour. Il fit le tour de la voiture, revenant s’installer derrière le volant, et je remarquai qu’il était plutôt athlétique. Il portait une chemine en coton blanc et un jean. Classe, mais sans trop de chichis.

- Comment vas-tu Abigaïl ? Bien dormi ?

Je fus surprise qu’il se souvienne de mon prénom.

- Je préfère Abby, s’il te plait. Mais oui, bien dormi. Et toi ?

J’avais évidemment mentit sur la nuit passée. Elle avait été agitée de cauchemars et de cris. Mais quel intérêt de lui raconter tout ça ?

- Où m’emmènes-tu ? Lui demandai-je.

- Tu verras…

Le voilà qui me refaisait le coup du sourire en coin ! J’insistai, craignant une mauvaise blague. Il était têtu mais j’obtins quand même un indice : dans son monde. Cette réponse m’avait tellement scotché que j’en restais bouche bée. Me prenait-il pour une idiote ? M’avait-il servit cette phrase pour que je cesse de poser des questions ? Sûrement. Je décidai donc de rester silencieuse, regardant le paysage défiler à travers les vitres de la voiture. Nous nous éloignions de la ville. Je n’avais aucune idée de l’endroit où nous étions. Je n’avais d’ailleurs pas d’autre choix que de lui faire confiance. Je venais à peine de le rencontrer, et pourtant j’étais à l’aise en sa présence, même s’il m’intimidait. C’était comme si un lien invisible nous reliait, sans que je ne sache pourquoi.

Perdue dans mes réflexions, je ne l’entendis pas me parler.

- Eh Abby ! Me héla-t-il. On est arrivé.

- Pardon ?

Je n’avais pas remarqué que nous étions à l’arrêt. L’endroit était étrange. On aurait dit un terrain vague. La peur commençait à me gagner. J’étais sorti de la voiture, regardant autour de moi, cherchant un éventuel moyen de m’enfuir.

- Où sommes-nous ?

Ma voix resta coincée dans ma gorge. Il sourit.

- Ne t’en fais pas.

Il se voulait rassurant. Posant une main sur mon épaule, il murmura à mon oreille :

- Tu es attendue, n’ai pas peur, tout ira bien.

Ses paroles, ou peut-être sa voix, me firent frissonner. Je restai figée, la mâchoire crispée, attendant que quelque chose se passe.

- Ferme les yeux.

Je l’observai avec méfiance. Son regard était doux, confiant.

- C’est juste un conseil. Se défendit-il en lisant la crainte sur mon visage.

Après un instant d’hésitation, je décidai d’obéir. Il attrapa ma main et je me sentis tout à coup nauséeuse. La tête me tourna, j’avais l’impression d’étouffer. Cette sensation ne dura que quelques secondes, une minute tout au plus.

- Ouvre les yeux, Abby.

Toujours sur mes gardes, je déplissai lentement mes paupières. L’endroit était différent. Ma vue était trouble de m’être tant crispée, mais le son qui parvenait à mes oreilles ne pouvait me tromper. Une chute d’eau ! La lumière du lieu était aveuglante, si bien que je papillonnai des yeux pour éviter de pleurer malgré moi. Puis enfin, je pus observer ce qui m'entourait. C’était un lieu féérique. Le soleil brillait comme jamais, le ciel azur était dépourvu de nuage. Au loin, une cascade déversait une eau turquoise et la prairie qui nous entourait était couverte d’une herbe luxuriante. Il n’y avait pas de route, tout n’était que verdure... Je cru rêver lorsque je vis passer à côté de moi, une licorne.

- Je… C’est une… ?

Ethan riait. J’avais les yeux exorbités, le doigt pointé vers l’animal fantastique. Jamais de ma vie je n’avais vu de pareil endroit, excepté dans mes rêves les plus fous. D’ailleurs, je devais être en plein rêve. Je fermai les yeux à nouveau et secouai la tête, m’ordonnant de me réveiller.

- Bienvenue chez toi, Abby.

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